Deux ans et demi après son premier album Frame of Mind, le
tromboniste Robinson Khoury revient avec un disque ambitieux, riche
et passionnant. Un album d’une grande maturité, très impressionnant
pour le deuxième disque d’un jeune musicien de 27 ans ! Avec cet
opus hors-norme, il explore un univers musical dense et profond,
autour d’une direction artistique exemplaire avec un groupe de premier
plan, cohérent et soudé.
Le concept de l’album est effectivement ambitieux et le résultat est à la
hauteur de cette ambition. Robinson Khoury est passionné par l’art
pictural du début du XXème siècle. Ce moment précis où la peinture
rentre de plein pied dans l’art moderne en délaissant le figuratif pour
s’intéresser à l’abstraction, à travers l’architecture et la géométrie. Un
travail formel novateur dont les pionniers furent Picasso, Braque, Léger,
Klee, Miro et Kandinsky.
PROCHAINS CONCERTS
• 02/05/22 – Nevers D’Jazz – Cosne sur Loire
• 10/05/22 – SORTIE D’ALBUM au Studio de l’Ermitage – Paris
• 28/05/22 – Jazz Sous les Pommiers – Coutances
• 02/06/22 – Hot Club de Lyon
• 05/06/22 – Couleurs Jazz – Lons Le Saunier
• 15/07/22 – Crescent Jazz Festival – Mâcon
• 13/08/22 – Festival des Pantomines – Savoie
Avec Broken Lines, à l’image de ces grands maîtres de la peinture
moderne (dont la pochette du disque signé Alewjin Don s’inspire),
Robinson Khoury cherche à casser les codes d’une trajectoire
musicale toute tracée, imposée par une pratique du jazz formatée
(thème-chorus-thème), pour faire exploser les formes et inventer une
nouvelle façon de jouer du jazz. L’idée est de créer un lien entre les
courants de la peinture du début du XX ème siècle (cubisme,
minimalisme et abstraction) et le travail de composition jazzistique, afin
d’obtenir un résultat qui associe les couleurs aux modes musicaux, et
les formes géométriques aux formules rythmiques.
Dans ce disque complètement maîtrisé et d’une grande richesse
d’inspiration, Robinson Khoury et ses musiciens explorent plusieurs
formats musicaux (la durée des morceaux oscillent entre deux et dix
minutes !), en mettant en avant une recherche formelle très aboutie, où
la palette de couleurs des peintres devient une palette sonore, les
pinceaux, des instruments de musique et la toile, un objet musical
parfaitement architecturé. Précisons également que certains morceaux
furent écrits en mettant en avant le côté graphique (et même parfois
cubique) de la partition !
Robinson Khoury malaxe sa pâte sonore à travers une riche couleur
de timbres et prend un malin plaisir à travailler sur les contrastes, sur la
densité, et sur le mélange des couleurs, au service de petits bijoux
musicaux parfaitement ciselés et étincelants.
Il est important de préciser que cet album aux propos conceptuel est
tout à fait accessible, car il s’agit avant tout d’une musique sincère qui
vient du cœur. Une musique riche et variée, où mélodie, harmonie et
rythme, sont toujours au service d’une construction musicale
ambitieuse et aboutie, mais parfaitement organique et vivante.
A deux reprises (Breaking The Lines et You & I), Robinson Khoury
s’aventure sans complexe dans le monde de la chanson, avec des
textes écrits par lui-même ou par son âme-sœur. Il nous prouve qu’il
est aussi un chanteur remarquable et sensible, capable d’une grande
force émotionnelle.
Robinson Khoury, trombone,
chant & compositions
Mark Priore, piano
Pierre Tereygeol, guitares & voix
Elie Martin-Charrière,
batterie & voix
Etienne Renard, contrebasse
Pour ce projet qui aime briser les lignes, pour s’aventurer dans l’inconnu, le non-figuratif et le non-convenu, Robinson Khoury a formé un quintette atypique où il est le seul souffleur (en exposant toujours les thèmes au trombone à la manière d’un chanteur) et où il est entouré par deux instruments harmoniques : le piano, joué par l’ami Mark Priore (déjà présent sur le précédent album) et le jeu de guitare très singulier de Pierre Tereygeol (repéré au sein du Baa Box de Leïla Martial et du groupe Suzanne). Le rythme est porté par le fidèle contrebassiste Etienne Renard (présent lui aussi sur Frame of Mind) au jeu d’archet très
lyrique, et par le formidable batteur Elie Martin-Charrière (repéré chez Pierrick Pédron) qui maitrise parfaitement bien la polyrythmie et les contrastes de dynamique.
Un groupe qui a parfaitement compris le parti-pris formel de Robinson Khoury et qui explore à merveille ces différentes lignes brisées, du bien nommé Kubism et ses variations géométriques apportées par d’impressionnants changements de rythme, à Moods, qui retrace le cycle d’une journée et permet à chaque musicien de s’exprimer à travers de flamboyants chorus, en passant par l’ambiance à la fois africaine et espagnole de Casaya. Il y a aussi l’univers pop-folk mélancolique de Distancing from Reality, la puissance sonore de
Emptyness Monochrome, où plusieurs motifs se tissent dans une même couleur harmonique et l’intensité dramatique portée par le jeu de construction cubique de Circled Blocks. Enfin, mentionnons la parenthèse poétique et polyphonique de Toudou Toudou, ainsi que l’exercice libre, court et improvisé des trois Estampes musicales, où l’impressionnisme côtoie l’abstraction, autour d’une simplicité et d’une rigueur proche de l’art pictural japonais.
Tromboniste au son riche, envoûtant et lyrique, Robinson Khoury s’affirme également comme un remarquable chanteur porteur d’une grande émotion. Il prouve également qu’il est un compositeur hors-pair à la recherche d’une voie hors des sentiers battus, doublé d’un leader capable de fédérer autour de lui des musiciens talentueux et imaginatifs, qui donnent le meilleur d’eux-mêmes.